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06/03/2012
En phase pilote, sous l’égide de l’INCa, la technique per-opératoire est un “traitement minute” de radiothérapie novateur contre les cancers du sein.
Depuis le 8 février, l’Institut Paoli-Calmettes propose à des patientes touchées par un cancer du sein une technique de radiothérapie nouvelle et prometteuse : la radiothérapie per-opératoire.
Pratiquée tout de suite après l’ablation de la tumeur, en salle d’opération, elle offre l’avantage de la précision sans majorer la toxicité par rapport aux radiothérapies classiques, et, comme ces dernières, elle réduit à moins de 5% le risque de récidives.
En associant la chirurgie et la radiothérapie, la radiothérapie per-opératoire de contact est donc une innovation majeure.
En contact direct avec la zone de la tumeur, l’irradiation est plus précise. Elle préserve mieux les tissus, sains, voisins de la zone à traiter, et, comme la radiothérapie externe, elle évite une ablation lourde d’organe. Elle remplace environ 25 séances de radiothérapie généralement pratiquées dans les semaines suivant la chirurgie. Ainsi, elle réduit le nombre de venues à l’hôpital, et épargne la pénibilité, et le coût, des trajets.
Désescalade thérapeutique contre le premier cancer affectant les femmes
C’est donc une technique très prometteuse contre certains cancers du sein. Avec plus de 50 000 cas par an en France, le cancer du sein est le plus fréquent des cancers chez les femmes. Si l’on ne sait pas le prévenir, depuis deux décennies, les progrès ont révolutionné les soins, et les pronostics de guérison pour ces cancers. La radiothérapie per-opératoire s’inscrit dans cette dynamique qui se caractérise également par des soins moins contraignants et moins invalidants.
Le traitement du cancer du sein fait appel à la chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie, l’hormonothérapie, les thérapies ciblées.
Dans chacune de ces ressources thérapeutiques, des découvertes récentes améliorent encore les chances de guérison, avec des soins moins invalidants. Ainsi, la chirurgie, qui était très mutilante autrefois, est de plus en plus préservatrice, et de moins en moins douloureuse : aujourd’hui, plus de 70 % des femmes conservent tout ou partie de leur sein.
Dans cette dynamique de désescalade thérapeutique - des traitements plus efficaces et moins pénibles, une dizaine d’essais ont prouvé qu’une chirurgie conservatrice - n’enlever que la tumeur, suivie de la radiothérapie, était aussi efficace que la mastectomie.
Pour permettre une chirurgie conservatrice, la radiothérapie adjuvante est indispensable afin d’éviter à la patiente un risque de récidive à 5 ans qui, en son absence, survient dans un tiers des cas.
Les techniques de radiothérapie pratiquées juste après l’ablation de la tumeur présentent deux avantages : la réduction substantielle des séances de radiothérapie et une irradiation partielle, et mieux ciblée, du sein. L’irradiation partielle du sein consiste en une irradiation du “lit tumoral" uniquement, au lieu d’irradier l’ensemble de la glande mammaire.
Le “boost” (dose concentrée) : réduire le risque de récidive à moins de 5%
La radiothérapie adjuvante permet de réduire de deux tiers les récidives locales, ramenant donc les 30% de récidive constatées à 10%, en traitant l’ensemble du sein à la dose de 50 Gy en 25 fractions de 2 Gy.
Depuis 15 ans, il a été montré que l’on peut encore réduire ce taux de 10%, en ajoutant un “boost”, c'est à dire une dose concentrée délivrée à l’emplacement de la tumeur. Plusieurs techniques de boost présentent des efficacités équivalentes : l’irradiation externe (en photons ou en électrons) et l’irradiation interstitielle (par curiethérapie). Deux essais randomisés ont prouvé que le boost réduisait de moitié le taux de récidive par rapport à une radiothérapie classique du sein. Le taux de récidive à 5 ans après irradiation de la glande mammaire sans boost, descend donc à 5% lorsque l’on ajoute un boost.
La participation à une étude et un programme pilotes au niveau national
L’IPC a été retenu par l’INCa (Institut National du Cancer), dans son appel à projets pour participer à une étude pilote nationale sur l’évaluation scientifique de cette nouvelle modalité thérapeutique en irradiation partielle pour la prise en charge des cancers du sein, étude pilotée par l’Institut de Cancérologie de l’Ouest (ICO), membre comme l’IPC de la Fédération UNICANCER, et qui a mené les premiers essais.
Avec plus de 2 000 patientes prises en charge en 2010, l’IPC figure parmi les références en matière de recherche et de prise en charge des cancers du sein en France.
L’IPC est déjà engagé dans une démarche d’hypofractionnement. La radiothérapie per-opératoire s’inscrit dans cette dynamique de progrès thérapeutiques.
Le programme s’intègre dans une coordination nationale pour participer à une étude scientifique et économique dont le but est de préciser les modalités de mise en oeuvre de cette technique nouvelle :
- La définition des bonnes pratiques chirurgicales et de radiothérapie,
- La définition des critères d’inclusion des patientes,
- La validation des protocoles de traitements.
Un équipement et une organisation opérationnels à l’IPC
Doté des infrastructures, des ressources humaines et de l’organisation pluridisciplinaire nécessaires, l’IPC a investi dans un appareil de radiothérapie de contact par photons de 50 Kv d’une valeur de 540 000 Euros. Une salle d’opération a été aménagée en radioprotection.
En plus des fonds propres de l’IPC, la subvention de l’INCa (à hauteur de 300 000 Euros) et l’aide de la Fondation d’Entreprise du Crédit Agricole Alpes Provence (d’un montant de 150 000 Euros) contribuent au financement de ce nouvel équipement, et des aménagements qu’il réclame.
Dans le cadre de ce programme pilote sur le plan national, en faveur de la recherche de progrès thérapeutiques, l’INCa alloue à l’IPC 300 000 Euros à l’IPC pour : contribuer à l’investissement dans un appareil de radiothérapie de contact ; et mener une évaluation scientifique et médico-économique de l’efficacité thérapeutique de cette méthode par rapport aux traitements standards.
Une technique accessible à l’IPC depuis le 8 février
L’appareil de radiothérapie per-opératoire est accessible à des patientes de l’IPC depuis le 8 février dernier. La phase d’essai durera 24 à 30 mois. Après évaluation, cette technique innovante sera ensuite généralisable sur le territoire national.
L’étude pilote validée doit permettre de déterminer les protocoles thérapeutiques de la radiothérapie per-opératoire en irradiation partielle : critères d’inclusion des patientes, protocoles d’administration, notamment dosimétriques. Les patientes doivent avoir plus de 60 ans, avec un certain type de tumeurs (tumeur unique sur bilan IRM, de type canalaire infiltrant, à récepteurs hormonaux positifs et Her 2 non suprexprimé) A ce jour, l’IPC estime à 80 le nombre de patientes qui pourraient être incluses dans la phase de démarrage.
Une généralisation de cette avancée thérapeutique pour d’autres formes de cancers
Les résultats de l’évaluation pilote nationale seront publiés à la fin 2013, pour une généralisation en France à partir de 2014, d’abord dans le cadre des cancers du sein. Car, s’il est aujourd’hui un recours thérapeutique de choix dans le traitement des cancers du sein, l’appareil de radiothérapie per-opératoire peut également être utilisé dans une variété de circonstances, comme le traitement des carcinomes colorectaux, ou l’irradiation per-opératoire de certaines récidives pelviennes ou gynécologiques.
Dès maintenant, cependant, cette technique de soins est utilisée pour des patientes qui peuvent bénéficier de traitements conservateurs du sein, comme une dose concentrée et immédiate après l’intervention : elle cible la zone atteinte du sein avant que celle-ci se modifie dans les semaines suivant l’intervention et avant la radiothérapie, quand le sein se reconstitue, rendant difficile l’identification de la zone initiale de la tumeur.
Photos copyright IPC
Crédit photos : Jean-Michel DUREY, Communication IPC
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